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Plume d'indien

Un petit sioux qui lutte contre l'apache blanche

Le Maté

Le Maté

Le maté figure parmi les incontournables de la culture argentine. Cette boisson chaude est un symbole national. Son image est notamment véhiculée à l’international par le ressortissant argentin le plus célèbre, Lionel Messi. On a vu le maté maintes et maintes fois courir entre ses mains ainsi que celles de son voisin uruguayen Luis Suarez sur le chemin du Camp Nou. Tel un ballon, il circule entre les joueurs, roule sur le gazon et réunit les foules. Le maté est suffisamment ancré dans le quotidien argentin que les compagnies aériennes autorisent les voyageurs à emporter en cabine un sac à maté en plus de l’habituel bagage à main. Alors, vous embarquez ?

A mon arrivée sur le sol argentin au petit matin, il n’a pas fallu une heure pour que l’on me propose un maté. En arrivant chez ma famille, le maté fut parmi les premières choses que l’on m’a proposées. Franchissez une porte, un maté vous sera tendu. Le maté est un rituel. Au même titre que la cérémonie du thé au Japon, prendre un maté en Argentine revêt un sens, traduit une culture, une façon de vivre, une façon d’être. Être à soi-même, être à l’autre. Le maté accompagne les moments de partage. Il lie les uns aux autres en circulant de main en main, comme un symbole du lien humain.

Le terme maté est riche en sens : il désigne aussi bien le récipient, traditionnellement fabriqué à partir de calebasse, que le nom de l’herbe que l’on fait infuser. Pour autant l’herbe maté est si commune qu’il n’est plus nécessaire de préciser qu’il s’agit de maté. Parler de « yerba » suffit alors.

La yerba est précieusement conservée dans les placards, endormie dans sa boîte de métal. Elle reprend vie lorsqu’elle se jette sur le bec verseur, telles les âmes s’avancent sur le tobogan universel avant leur incarnation.

Le maté reçoit la yerba. Elle est contenue en son sein, protégée des aléas du monde extérieur. A la manière d’un cirque de montagne, le maté écarte les vents violents pour que ses valeurs restent en son cœur. Il fait don de son corps pour préserver une herbe délicate et précieuse. Avec sa forme évidée, le maté offre l’unité. Unité de la yerba. Unité des personnalités. Unité spatiotemporelle qui célèbre la présence mutuelle.

La bombilla se glisse au fond du maté. Faite de métal, elle reçoit les impulsions électriques du ciel pour les remettre en terre. Point de passage entre les mondes. C’est par elle que l’on aspire la boisson autant que l’on souffle pour faire rougeoyer les braises. Au-dessus du foyer, l’eau est entrain de chauffer. Aux environs de 80 degrés, on la versera dans le maté.

Ça y est, la yerba infuse ses saveurs. Au contraire de nos thés et infusions, ce ne sont pas les plantes qui viennent à l’eau mais bien l’eau qui va à l’herbe. Métaphore de la vie qui voit les pluies du ciel irriguer les champs de terre et nourrir l’Homme. Reproduction miniature de notre mère nature.

Si le maté réunit, feuilles et personnalités, il inscrit aussi le mouvement, il initie une danse. Imbibées d’eau, les feuilles se mettent à danser. Le maté lui aussi est pris dans la ronde des personnalités, circulant de main en main. Il voyage de celle qui verse l’eau, à celle qui boit, en passant par toutes celles qui ont porté la boisson pour réaliser la jonction. L’herbe dansant dans le maté, le maté tournant dans un groupe en cercle. Deux mouvements elliptiques entrelacés qui infusent dans l’instant quelque chose d’infini.

Infini que l’on retrouve en tout point, dès lors que l’on tient un maté à la main.

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