Gardien de but

13/12/2016 10:43

Vingt-deux joueurs, un arbitre et soixante mille spectateurs.

Soixante-deuxième minute, le stade se lève. Des milliers de mains se mettent en mouvement, frappant leur voisine avec vigueur et respect. Le brouhaha de ces membres en action parcourt les gradins avant de s'élever sous la charpente. A l'unisson, les spectateurs applaudissent offrant une magnifique ovation aux acteurs de la partie. Le score est pourtant vierge, aucun but n'est marqué. Aucune action de jeu spectaculaire, aucun arrêt de classe ou geste technique digne de faire lever un stade. Pourtant, le public est debout.

Au centre du terrain, ce gardien de but. La semaine précédant la rencontre, il perdait sa mère, alors âgée de soixante-deux ans. Au beau milieu de sa surface, il était loin du jeu. Ses camarades s'échangeaient le ballon loin devant pour porter le danger sur la cage adverse. Lui était seul, à l'autre bout du terrain. Seul, cet homme l'était avant la soixante-deuxième minute.

S'extrayant de la compétition, le public pénétra la surface de réparation et entoura le joueur en deuil. Partie des gradins, la clameur vibrante s'invita sur le pré enlaçant le gardien de ses bras. Le tableau d'affichage disparu, la foule avait gagné la pelouse pour soutenir un camarade en difficulté.

Emu aux larmes, le gardien de but applaudit à son tour en guise de remerciement. Si le score était vierge, son cœur ne l'était plus. Soixante mille personnes venaient d'y déposer un peu de chaleur.